« Le fait de travailler sur le XXème siècle impose à l’historien de cette période de prendre en considération le cinéma […] Il est impossible d’éluder [ce] phénomène fondamental de la vie des sociétés contemporaines, et, par sa seule existence et la place qu’il occupe au XXème s., il fait partie de l’étude du champ historique.<1>Serge Berstein, « Points de vue sur les rapports de l’Histoire et du cinéma », dans Cinéma et Histoire. Histoire du cinéma, Cahiers de la cinémathèque n° 35-36, 1982, p 12 De fait, le cinéma, est un passage quasi obligé pour l’étude du XXème siècle. Il fait du document filmique un document irremplaçable sur la société : ses mythes, ses valeurs, ses problèmes.
Le cinéma apparaît tout à la fois comme le miroir de la société<2>cf Catherine Gaston-Mathé, La société française au miroir de son cinéma : de la débâcle à la décolonisation, Seuil, panoramiques, 1996, 361 p ou La société française au miroir de son cinéma, Le Cerf, 2001, 366 p : il la reflète, il la met en scène, il en livre une représentation. Miroir, mais aussi éponge de la société : il s’en imprègne et il n’est finalement que le produit des représentations sociales, des luttes, des rapports sociaux en cours. A l’enseignant d’histoire la tâche de les (faire) révéler.<3>Sur les rapports entre cinéma et histoire, cet article ne se terminera pas par une bibliographie : les notes renvoient largement aux ouvrages consultés.
Sur les rapports plus spécifiques entre image et propagande, on peut lire avec profit les ouvrages essentiels de Laurent GERVEREAU, Les images qui mentent. Histoire du visuel au XXème siècle, Seuil, 2000, 456p, et Un siècle de manipulation par l’image, Somogy/BDIC, 2000, 143 p. ainsi que le livre de Fabrice d’Almeida, Images et propagande, Casterman/Giunti, coll XXème siècle, 1995, 191 p
Pour une utilisation pratique et pédagogique, en classe, la pochette de 30 transparents Un siècle de propagande par l’image. Le XXème siècle, livret 64 p, Eduscope/Nathan, 2000 et la cassette vidéo Cinéma et propagande. Les régimes totalitaires de l’Entre-Deux-Guerres, livret d’accompagnement 32 p, Eduscope/Nathan, 2000 offrent d’utiles ressources.
1) Cinéma et Histoire
A/ LE FILM : UNE SOURCE
Il est nécessaire de traiter le film comme une source de l’Histoire, qu’elle soit complémentaire, partielle ou exclusive. Le film doit être en effet envisagé comme une source, parmi d’autres, intégrée dans la démonstration historique. Le film est un document d’histoire, au même titre qu’une affiche, qu’un discours, qu’un article de presse, qu’une photographie. Cette source apporte deux types d’informations :
– des informations en plein : ce que je vois. Elles ont alors pour vertu de confirmer, d’authentifier ou d’attester. Par exemple, pour les manifestations de rues, l’image nous renseigne sur les postures, sur les pancartes et leur message, sur la part des sexes ou des couches sociales dans la manifestation etc…<4>cf les travaux récents de Danièle Tartakowski, en particulier sa thèse, Les manifestations de rue en France 1918-1968, Publications de la Sorbonne, 1997, 869 p Dans les actualités, même à travers le prisme -ou l’auto-censure, voire la censure- des autorités, au-delà même de l’idéologie que peuvent véhiculer les images, il n’en reste pas moins qu’elles permettent d’identifier les acteurs en jeu, de témoigner sur tel ou tel fait, tel ou tel événement.
– des informations en creux : ce que je ne vois pas…. mais que le cadrage, la lumière, un fondu… peuvent révéler : «ce qui n’a pas eu lieu (et aussi pourquoi pas ce qui a eu lieu), les croyances, les sentiments, l’imaginaire de l’Homme, c’est autant l’Histoire que l’Histoire»<5>Marc Ferro, Le film, une contre analyse de la société, AESC, 1973/1, p 114. Ainsi en creux, il existe souvent des décalages entre la réalité vécue au quotidien et sa traduction à l’image. Trois exemples semblent particulièrement probants :
- sur un film, le cas peut-être le plus célèbre est celui des fondus enchaînés du Juif Süss, de Veit Harlan (1940)<6>cf François Garçon, « Cinéma et histoire : les trois discours du Juif Süss », AESC, juillet-août 1979, p 694-720 et Marc Ferro, « Les fondus enchaînés du Juif Süss », Cinéma et histoire, Folio/histoire, édition 1993, p 159-161
- sur une année d’actualités filmées en Allemagne : aucun sujet, en 1932, sur la montée du nazisme n’est diffusé dans les actualités cinématographiques (Wochenschau, littéralement, « spectacle de la semaine »). L’idéologie nazie n’y est pas moins présente sous d’autres formes. Non qu’elle soit explicitement filmée, mais du moins apparaît-elle comme par analogie ou par écho à travers des sujets traitant du folklore, de la nostalgie de l’armée, de l’effacement du rôle des femmes dans les prises de décision, du respect des autorités… Bref, autant de bouts de pellicule figurant d’une certaine manière une image de l’Allemagne éternelle…
- sur la production d’œuvre filmées entre 1940 et 1944 en France : aucune fiction antisémite de création française n’est tournée. Peut-on pour autant affirmer que Vichy n’est pas antisémite ?
Pour traiter le film comme une source de la démonstration historique (et donc comme n’importe quelle autre source !), il est impérieux de :
– Identifier les tenants et aboutissants du message : le cinéma quelle que soit sa forme (actualité, fiction documentaire, dessin animé…) est un moyen technique de conditionnement des foules. Se poser un certain nombre de questions évite de tomber dans le piège d’une lecture au premier degré :
- qui est à l’origine du film (commanditaire ? commande ? destinataire ?)
- qui en assure la diffusion (production ? distribution ?)
- quel est l’impact auprès du public ? (contemporain ? ultérieur ?)
– Confronter le film avec les autres sources de l’époque : c’est souvent sur ce principe que se fondent nos cours. Il s’agit ici de mettre en relation, de confronter l’extrait filmique avec d’autres matériaux de l’Histoire, écrits ou iconographiques, afin d’en faire mieux apparaître son originalité ou sa représentativité.
– Réaliser la critique du document : il faut que soit présent à l’esprit que le cinéma :
- est un discours idéologique car la plupart du temps contrôlé par les forces dominantes (politiques, religieuses, économiques…) donc masquant et/ou travestissant la réalité
- est le réceptacle en même temps que le diffuseur des représentations, des fantasmes, des tabous d’une époque (Il en va ainsi de La Grande Illusion à Independance Day).<7>cf Anne-Marie Bidaud, Hollywood et le rêve américain : cinéma et idéologie, Masson, 1997, 248 p
B/ LE FILM : UN DISCOURS SUR LA REALITE ET NON LA REALITE
Dès les premières «actualités» Méliès, la caméra n’enregistre et le cinéma ne diffuse qu’une reconstitution des faits … en réalité fiction inspirée et censée évoquer l’Histoire…
Quel que soit le mode utilisé (documentaire, fiction, actualités…) il existe une intention, une idéologie, une interaction avec un message. Pour preuves, parmi beaucoup d’autres :
– la mise en place et le fonctionnement de la censure<8>cf Jean-Luc DOUIN, Dictionnaire de la censure au cinéma, PUF, collection Perspectives critiques, 2000, 720 p ou encore, pour l’exemple soviétique Natacha Laurent, L’œil du Kremlin. Cinéma et censure en URSS sous Staline, Privat, Bibliothèque historique, 2000, 282 p, et la tentative quasi-permanente de contrôle des medias, dans les régimes démocratiques, tout autant que dans les régimes liberticides ;<9>cf Catherine Bertho-Lavenir, La démocratie et les medias au XXème siècle, Armand Colin, 2000, 284 p
– la mise sous contrôle de forces dominantes de toutes sortes, notamment l’Eglise<10>cf Une invention du diable ? Cinéma des premiers temps et religion, ss dir R. Cosenday, A. Gaudreault et T. Gunning, Payot/Presses de l’Université de Laval, 1992 . Le 29 juin 1936 Pie XI dédie son encyclique pontificale «Vigilanti cura» aux «spectacles cinématographiques», justifiant son intervention par «les tristes progrès de l’art et de l’industrie cinématographiques dans la divulgation du péché et du vice»<11>Cité par Lorenzo Quaglietti, « Economie et politique dans le cinéma italien (1927-1944) », dans Le cinéma italien, de la prise de Rome (1905) à Rome, ville ouverte (1945), ss dir Aldo Bernardini et J.A. Gili, Centre Georges Pompidou, 1986, p 137-155. Le pape encourage les instances de l’Eglise catholique à contrôler les œuvres cinématographiques et leur diffusion, parfaitement conscient de pouvoir, en amont et à terme, peser sur les choix de production: «il est absolument nécessaire que dans chaque pays les évêques instituent un bureau permanent de contrôle, dans le but de promouvoir les films honnêtes, de classer tous les autres selon les catégories indiquées ci-dessus et d’en faire parvenir les jugements aux prêtres et aux fidèles […]. De plus, ce bureau s’occupera de l’organisation des cinémas existant auprès des paroisses ou au siège des organisations catholiques, de telle manière que ceux-ci ne programment que des films approuvés. De fait, grâce à la discipline ordonnée de telles salles, qui pour l’industrie représentent souvent de bons clients, on pourra également exiger que l’industrie produise des films pleinement en accord avec nos principes (…). »
Enfin, l’analyse minutieuse du montage, de la bande son et de la bande image sont extrêmement précieux.
Leur assemblage crée de l’émotion, du sens et contribue à former les représentations et les mythes d’une société, à nous révéler son non-conscient collectif.
Dans cette perspective, le cinéma est bien un «agent de l’Histoire» car il contribue parfois très activement à la formation de ces représentations. Dès 1929, Vanzetti ne s’y trompait pas : en évoquant le formidable pouvoir du cinéma, il dénonçait ces «idylles qui déforment la vérité et les réalités de la vie, qui cultivent et embellissent toutes les émotions morbides, toutes les confusions, toutes les ignorances, tous les préjugés, toutes les horreurs, et qui, volontairement et avec habileté, pervertissent les cœurs et, plus encore, les esprits»<13>The letters of Sacco and Vanzetti, Londres, 1929, cité dans – Jay Leyda, Kino. Histoire du cinéma russe et soviétique, L’Age d’Homme, 1976, p 63. L’intervention des représentations dans l’histoire des sociétés est donc loin d’être anecdotique : « le sentiment qu’éprouvent les individus et les groupes de leurs positions respectives et les conduites que dictent ces sentiments, ne sont pas immédiatement déterminées par la réalité de leur condition économique mais par l’image qu’ils s’en font, laquelle n’est jamais fidèle mais toujours infléchie par le jeu d’un ensemble complexe de représentations mentales».<14>Georges Duby, lors de sa leçon inaugurale au Collège de France, cité par Jacques Bonnet, Le mental et le fonctionnent des sociétés, dans Georges Duby, L’ARC n° 72, 1990, p 3 Ainsi le cinéma contribue-t-il, en quelque sorte, à l’invention d’un réel imaginaire.
2) Cinéma et Propagande
Le terme « propagande » vient de propagande fide, vocabulaire religieux employé au temps de la Contre-Réforme. Il perd son sens religieux vers la fin du 19ème siècle. On peut trouver ici ou là des définitions assez traditionnelles qui en livrent une acception assez large. La propagande politique peut être définie par l’emploi de techniques d’influence par un gouvernement, un parti, une administration… en vue d’influencer l’opinion, de modifier le comportement du public dans le but que les personnes adoptent une opinion et une conduite déterminées.<15>Définition adaptée de la proposition de Jacques Ellul (Propagandes, Economica, 1994, 364 p) qui avance plusieurs types de propagandes, dont la « propagande sociologique » définie comme « un ensemble de manifestations selon lesquelles une société tente d’intégrer en elle le maximum d’individus [et] d’unifier le comportement de ses membres selon un modèle »
L’image s’impose très vite comme le media privilégié, le support le plus adapté à la propagande politique. Au début du XXème siècle, l’image prend véritablement le pouvoir dans la presse traditionnelle (lithographies, caricatures), dans les magazines (Vu, fondé en 1928, Life en 1936), ou au cinéma, devenu parlant à partir de 1927.
A/ DEBUT XXEME : UN TOURNANT, UN SAUT QUALITATIF DE LA PROPAGANDE
Son utilisation massive en particulier à des fins de propagande politique, résulte de la combinaison née de l’explosion des moyens de communication, de l’irruption des masses et d’une réflexion sur l’art. En Europe de l’Ouest, la conjonction de trois phénomènes au tournant du siècle est telle, que la portée de l’influence de l’image s’amplifie très rapidement :
– un phénomène de concentration urbaine d’origine industrielle aux conséquences sociales déstructurantes.
De nouvelles conditions de vie créent un véritable vide idéologique dans lequel s’engouffre la propagande :
- la destruction des structures traditionnelles (famille/hameau/paroisse/village)
- l’isolement intense de l’individu
- de nouvelles habitudes (habitat/costume/langage/travail)
- de nouvelles préoccupations ( l’insécurité de l’emploi / le chômage / la crise économique / la parcellisation du travail et nouvelle forme d’aliénation)<16>cf Les Temps Modernes, de Charlie Chaplin
– parallèlement l’explosion des techniques d’information et de communication livre à la propagande ses moyens d’action.
Une extension de vaste ampleur caractérise en effet :
- l’écrit, avec l’invention de la rotative , l’utilisation de la publicité, l’ accélération de la distribution par les transports, l’accélération de l’information via le télégraphe et le développement des agences de presse
- la parole, amplifiée par l’invention du microphone qui porte la voix du hall d’école au stade, puis celle de la TSF, qui répercute la voix dans les espaces publics comme dans le domaine privé<17>Sur les liens qui nouent la voix (et la musique) au politique, en particulier concernant l’exemple nazi, on pourra se reporter avec profit à l’essai récent de Michel Poizat, Vox populi, vox dei. Voix et pouvoir, Editions Métaillé, 2001, 321 p
- l’image enfin. D’abord les photographies, dont l’usage se démocratise. Elles s’emparent rapidement de la presse périodique à l’instar du magazine Vu, un précurseur en la matière. L’utilisation massive de l’image est le parti pris qui prévaut à sa fondation par Vogel en 1928. Il rompt alors avec la formule de la photographie isolée, comme peut le pratiquer un vieux magazine comme L’Illustration, né en 1843. Le premier numéro de Vu ne comporte pas moins de soixante épreuves et annonce dans sa déclaration d’intentions son souhait de «relier le public au monde entier [en mettant] à la portée de l’œil la vie universelle [par] des pages bourrées de photographies traduisant par l’image les événements politiques français et étrangers».
Le cinéma ensuite, qui donne à voir une image « plus véridique » et plus saisissante que les photographies. La télévision plus tard, qui allie elle aussi l’image et le son, pour venir s’installer à domicile.
– la naissance d’une obsession : encadrer les foules. C’est enfin la «masse moderne» qui définit le champ d’action de la propagande et pose le problème, au tournant du XIXème et du XXème siècle, de l’encadrement du nombre. Le sociologue français Gustave Le Bon (1841-1931) publie en 1895 une Psychologie des foules dans laquelle il soulève, avec crainte, le fondement instinctif, impulsif et malléable de la foule. Selon lui, «les foules ne pouvant penser que par des images, ne se laissent impressionner que par des images. Seules ces dernières les terrifient ou les séduisent et deviennent des mobiles d’action»<18>Gustave Le Bon, Psychologie des foules, (1895), PUF, Quadrige, 2002, 132 p . Ainsi dans son ouvrage tente-t-il de livrer des pistes pour captiver l’attention des masses, pour canaliser leur énergie. Il aboutit à la conclusion que l’image, savamment utilisée, peut façonner le comportement de la foule, par définition mobile et irritable.
«De telles thèses – dont l’audience est énorme durant toute la première moitié du XXème siècle – ouvrent directement sur ce nouvel instrument du pouvoir qu’est la propagande. Les régimes soviétique, nazi et fasciste (Hitler et Mussolini ont lu Le Bon avec attention), entièrement structurés à partir de mouvements de masse, sont les premiers à s’en saisir. Aux côtés des techniques modernes de communication (radio, cinéma, photographies, arts graphiques), l’art se voit bientôt confier la mission de façonner une humanité nouvelle – peu importe que cette dernière soit gouvernée par des principes de race ou de classe – au moyen d’images simples et fortes, univoques».<19>Adrienne Reitz, l’ABCdaire des années 1930, Flammarion-Paris musées, 1997, p 98
Ce type de communication entre cette foule «qui ne saurait se passer de maître» passe par la séduction, par l’émotion, par la mise en spectacle. A la formule simple prêtée à Mussolini, «Le cinéma est l’arme la plus forte», Hitler, dans son ouvrage Mein Kampf, précise les fonctions qu’il veut faire assumer à l’art en général, au cinéma en particulier : «L’art doit consister à attirer l’attention de la multitude […], son action doit toujours faire appel au sentiment et très peu à la raison […] L’art de la propagande consiste à être capable d’éveiller l’imagination publique en faisant appel aux sentiments des gens, en trouvant des formules psychologiquement appropriées qui attirent l’attention des masses et toucheront les cœurs […]L’image, sous toutes ses formes, jusqu’au film, a encore plus de pouvoir sous ce rapport. Là, l’homme doit encore faire moins intervenir sa raison ; il lui suffit de regarder et de lire, tout au plus, les textes les plus courts».<20>cité dans A. Guyot, P. Restellini, L’art nazi. Un art de propagande, Ed° Complexe, 1996
Au même moment, Staline, est conscient des vertus possibles de l’utilisation du cinéma à des fins idéologiques: «Le cinéma est le plus efficace outil pour l’agitation des masses. Notre seul problème, c’est de savoir tenir cet outil bien en main»<21>cité dans Cinématographe n°55, 1979, p 4 .
C’est bien dans l’Entre-Deux-Guerres que l’Etat totalitaire tente d’instrumentaliser la puissance médiatique<22>cf Francis Courtade, Pierre Cadars , Histoire du cinéma nazi, Le Terrain vague/Eric Losfeld, 1972, 397 p ; J.A. Gili, L’Italie de Mussolini et son cinéma, H. Veyrier, 1985, 206 p ; J-L. Passek ss dir, Le cinéma russe et soviétique, C. G. Pompidou/L’Equerre, 1981, 344p : «pour la première fois, la concentration totale des moyens de communication aux mains d’un Etat lui permet de contrôler l’imaginaire» <23>Fabrice d’Almeida, Images et propagande, op. cit. , p 39
B/ LES REGLES FONDAMENTALES DE LA PROPAGANDE POLITIQUE SONT AISEMENT TRANSPOSABLES AU CINEMA<24>Concernant les « règles » proprement dites, cette partie tient largement de l’emprunt à JM Domenach, La propagande politique, PUF,QSJ?,1950 1ère édition, p 44-83 et de la toujours stimulante lecture de Serge Tchakhotine, Le viol des foules par la propagande politique, Gallimard, 1952 (1ère édition 1939), 605 p réédité dans la collection Tel en 1992
Il n’est pas ici question de règles appliquées de manière mécanique, mais de principes généraux dont la conjonction permet de monter des réflexes conditionnés. Polymorphe, la propagande politique se joue de ressources infinies : l’imprimé (livre, journal, tract, papillon…), la parole (radio, haut-parleur, chant, discours …), le spectacle (manifestation de masse, théâtre, conférences dialoguées…) ou l’image fixe (affiche, caricature…) ou animée (le cinéma et ses diverses productions : actualités, documentaires, films de fiction, dessins animés…).
D’autre part, il s’agira pour nous d’envisager le film de propagande, et non le film militant<25>Si le film militant s’inscrit « dans une lutte à caractère politique, social ou idéologique, [il] rend compte d’une situation estimée injuste pour la dénoncer ouvertement ». Privilégiant ainsi la contestation, « même s’il se prévaut d’un engagement, [il] se distingue ainsi du film de propagande qui plaide la soumission à une cause ou un parti » (Vincent Pinel, Ecoles, genres et mouvements au cinéma, Larousse, 2000, p 142), en ce qu’il s’inspire, reproduit ou génère des mécanismes de propagande politique.
– le principe de simplification et d’ennemi unique.
Dans un but de clarté et de mémorisation, le principe de simplification se base sur l’utilisation d’un mot d’ordre, ou un slogan (« Ein Reich, EinVolk, Ein Führer » ; « Croire, obéir, combattre« …) et de symboles graphiques (drapeau, emblème, insigne…), plastiques ( salut, poing levé…) ou musicaux (hymne…)
Dans le même souci, prêcher l’ennemi unique ramène les problèmes à une catégorie («Les Juifs», «Les communistes»…).
Le cinéma américain a excellé en la matière au temps du Maccarthysme et de la chasse aux sorcières<26>cf Gilles Laprévotte, Michel Luciani et Anne-Marie Mangin, La grande menace : le cinéma américain face au maccarthysme, Trois Cailloux, 1990, 347 p. La propagande anticommuniste a investi tous les genres :
- les actualités filmées. Dès 1947, un numéro des actualités américaines de fin d’année revient sur «1947. Year of division» pour semer le doute chez les Américains -naïfs- qui, alors, voient encore dans l’URSS le partenaire de la « Grande Alliance ».
- les documentaires. Un an plus tard, en 1948, la célèbre émission The March of the Time titre «Answer to Staline…» expose les craintes américaines vis-à-vis des intentions supposées plus que belliqueuses de Staline. Bientôt, l’opinion publique, qu’on prédispose à adopter l’anticommuniste comme valeur américaine, est mûre.
- les films de fiction. Ils sont nombreux à désigner l’ennemi « rouge », dès 1949, avec The Red Menace, de R.G. Springsteen, pour déboucher sur les films de science fiction ou les westerns desquels sortent des justiciers surgis de nulle part pour rétablir l’ordre d’une menace souvent invisible. Deux genres au service de la guerre froide.
- les publicités, à l’instar de celles vantant les panoplies d’espion pour les enfants, en 1960. Elles contribuent à conditionner des réflexes de défense et de sécurité, autour d’un ennemi invisible, justifiant le recours à l’espionnage. De telles publicités envahissent alors les écrans.
Dès 1947, Eric Johnston<27>Représentant des intérêts du cinéma américain dépêché en France lors des négociations entourant les modalités du plan Marshall, en 1947., qualifié de «grand dictateur du cinéma américain» par le journal L’Humanité du 20-21 juillet, affirmait, devant la commission des activités anti-américaines : «le cinéma américain est et doit être toujours davantage une arme de combat contre le communisme […] Les films américains apportent des preuves palpables du mensonge de la propagande totalitaire. La vieille légende de la décadence du capitalisme aux Etats-Unis s’effondre sitôt que le public a la chance de voir nos films et d’en tirer ses conclusions»<28>Cités dans Patricia Hubert-Lacombe, Le cinéma français dans la guerre froide 1946-1956, L’Harmattan, 1996, p 84 et 108
– la règle de grossissement et de défiguration.
Corollaire immédiat de la précédente, cette règle, simple, consiste à gommer la moindre nuance dans l’image qu’on veut donner : accentuer, exagérer et surtout ne pas nuancer ni détailler.
L’œuvre maîtresse de l’imagerie raciste engendrée par les nazis, Der Ewige Jude, (Le Juif éternel) réalisée en 1940 par Fritz Hippler, en est un exemple abouti. Le NSDAP, début 1940, charge Fritz Hippler de réaliser un documentaire -un genre censé enregistrer le réel- de démonstration pédagogique avec pour objectif que «la haine des juifs n’apparaisse pas comme résultant d’une volonté préétablie par les autorités nazies, mais comme émanant de la réalité même des mœurs et du comportement de ceux qui constituaient l’antirace»<29>Christian Delage, La vision nazie de l’Histoire à travers le cinéma documentaire du Troisième Reich, L’Age d’Homme, 1989, 252p . Le montage (un peu plus d’une heure) développe trois axes : démontrer la spécificité raciale des Juifs par leur physionomie stéréotypée ; insister sur leur mode de vie et leurs coutumes religieuses qui n’ont rien d’occidentales ; montrer que les juifs profitent d’un travail qu’ils ne produisent pas et que par leur présence diffuse mais influente, ils représentent un véritable danger pour la «race» et la civilisation européenne. Un extrait désormais tristement célèbre -repris dans l’adaptation française Le péril juif sorti sur les écrans parisiens en 1942- compare de façon explicite le Juif au rat. Un animal qui, au XXème siècle, ne symbolise plus tant les grandes épidémies d’antan, qui cristallisaient peurs et angoisses, qu’un animal nuisible mais intelligent, intrinsèquement porteur du germe de la destruction systématique à son profit… «Grossissement et défiguration»… Dans ce cas l’image apparaît bel et bien comme la matrice de l’imaginaire antisémite.<30>Sur le rôle majeur de la construction de l’image comme matrice de l’histoire, Vingtième siècle. Revue d’histoire a publié un numéro spécial intitulé Image et Histoire, coordonné par Laurence Bertrand-Dorléac, Christian Delage et André Gunthert. (n°72, octobre-décembre 2001, 187p)
– la règle d’orchestration
La règle d’orchestration peut se décliner à travers :
- la répétition inlassable des thèmes principaux (antibolchévisme, antisémitisme…) alliée à une certaine variété de représentation et adaptée à un public spécifique. Les documentaires de propagande politique proposés sur les écrans de la France de Vichy sont un modèle du genre. Ils ont pour finalité de «provoquer la réaction instantanée et ponctuelle du public […] et sont réalisés en fonction des préoccupations du moment»<31>Jean-pierre Bertin-Maghit, Le cinéma sous l’occupation. Le monde du cinéma français de 1940 à 1946, O. Orban, 1989, p 137 .Déclinant tantôt une propagande vichyste, tantôt anti-alliée ou encore pro-allemande, les titres de ces courts et moyens métrages (soit raccrochés au journal filmé, soit projetés en première partie) ou longs métrages (qui suivent alors le circuit de distribution des films de fiction) sont éloquents. Les uns vantent la Révolution Nationale (Fidélité ; La terre qui renaît etc…), les autres montrent du doigt les responsables de la défaite (Le péril juif ; Les corrupteurs ; Forces occultes ; etc…). Plus de 400 au total, réalisés par chaque ministère, et dont la diffusion est rendue obligatoire dans les salles à partir d’avril 1943.<32>Le documentaire intitulé Les documenteurs des années noires, écrit par Jean-Pierre Bertin-Maghit et réalisé par Guylaine Guidez (coproduction France 3 / Bailleul Productions) en propose trente extraits
- le démarrage en accroche, finir en apothéose. Le premier discours de Hitler en tant que chancelier, prononcé le 10 février au Palais des sports de Berlin est un exemple du genre. Le discours est retransmis par la radio, et écouté par 20 millions d’auditeurs selon Goebbels. Après une mise en scène simple (discours de Goebbels pour chauffer l’auditoire, entrée de SA qui portent des bannières frappées de la svastika, roulement de tambour), Hitler, en bon tribun, joue de sa voix, qu’il ménage (longues pauses) ou perd (cris quasi-inaudibles), de son corps (pointe du doigt, petit pas sur le côté, se frappe la poitrine…) dans l’intention de soulever la foule présente. Le discours est rapidement diffusé par le parti nazi sous la forme d’un documentaire de 42 minutes intitulé Hitlers Aufruf an das Deutsche Volk (Appel d’Hitler au peuple allemand).
- la dissimulation ou le truquage des nouvelles favorables aux adversaires. N’est-ce pas là le lot commun des actualités cinématographiques en période de conflit, ceci dans chaque camp et quelle qu’en soit la nature (les deux premières guerres mondiales, la guerre civile qu’est la guerre d’Algérie, les guerres sociales, à l’instar de la grève des mineurs en France en 1947 etc…) ?
– le principedetransfusion.
Il s’agit là de partir d’un substrat préexistant. Par exemple, des rancœurs issues d’une défaite qu’elle soit militaire, économique, sociale ou « raciale » ; ou encore vieux mythes fondateurs, les étapes passées de la grandeur nationale. Bref, en s’appuyant sur un fonds culturel commun, fût-il diffus, l’objectif est bien de caresser la foule dans le sens du poil…<33>A ce titre, la fameuse phrase lancée par Pétain, « Français, vous avez la mémoire courte !, » est très mauvaise. Elle est reprise pour titre d’un documentaire de propagande produit en 1942 par le secrétariat général à l’information et réalisé par Jean Morel et Jacques Chavannes.
A ce titre, le film Condottieri<34>Sorti sur les écrans en 1937, c’est le premier exemple d’œuvre cinématographique officiellement commune à l’Allemagne nazie et à l’Italie fasciste, réalisé et interprété par un des grands scénaristes du cinéma nazi : Luis Trenker, film d’évasion dans le temps, relate la Renaissance italienne, la période la plus fréquemment portée à l’écran : plus de 20 films sous l’ère fasciste y sont consacrés. Le Quattrocento est représenté alors comme une étape de l’unité italienne en marche, en même temps qu’il rappelle la richesse, la puissance, la suprématie artistique et le rayonnement intellectuel des Etats italiens. Cependant, c’est bien d’un film sur l’Italie fasciste dont il s’agit. Si quantitativement, les films d’évasion (qui distraient les populations de leur sort quotidien et les détournent d’éventuelles revendications) sont de loin les plus nombreux, Condotierri est une œuvre réalisée avec des intentions propagandistes très précises. Son épine dorsale est bien le nationalisme, fréquemment abordé dans les films de reconstitution historique. De même, dans Scipion l’Africain, de Carmine Gallone, en 1937, la fiction cherche délibérément à établir une filiation entre l’empire romain et l’empire fasciste.
– la règle d’unanimité et de contagion.
Cela consiste à renforcer ou créer une impression d’unanimité (ex : «Le peuple de Paris ; etc.) comme moyen à la fois d’enthousiasme et de terreur
De même, faire croire que ce que je professe est l’opinion générale professée autour de moi participe du même ressort (ex : « je dis tout haut ce que les autres pensent tout bas« ). Enfin, avoir recours à la manifestation, au défilé de masse pousse à l’entrain, à la contagion par l’exemple. Il existe de la sorte divers moyens de contagion : l’utilisation des drapeaux , des étendards (pavoiser partout), des emblèmes, des insignes reproduits partout. Mais encore inscrire la devise, les thèmes du parti, encourager le port de l’uniforme. L’utilisation de la musique qui noie les individus et renforce la cohésion est particulièrement suggestive (marches, chants, hymnes). Les manifestations nocturnes et l’utilisation de torches, de projecteurs contribuent à générer une atmosphère religieuse dans laquelle flottent les vieux mythes, à la fois exaltants et terrifiants. Enfin, la prescription de toute sortede gymnastique : salut, debout, assis, vivas, silence…
Bien qu’elle s’en défende,<35>Et avec vigueur, comme on peut la voir dans les interviews successives qu’elle accorde à Ray Müller, dans Le pouvoir des images, documentaire européen réalisé en 1992, ou plus récemment encore, à l’âge de 100 ans, dans Courrier International n°616, 22-28 août 2002, p 31-33 Leni Riefenstahl a produit un long métrage qui est un modèle du genre. Il s’agit bien entendu du Triomphe de la volonté : un reportage sur le congrès du parti nazi qui s’est tenu à Nuremberg du 4 au 10 septembre 1934. Tourné avec des moyens considérables par la cinéaste, le film fut une arme majeure pour la propagande hitlérienne dans les années d’avant-guerre. Leni Riefenstahl insiste sur les signes, les emblèmes, les insignes, dont les théoriciens du national-socialisme avaient senti le magnétisme pour entraîner les foules. La cinéaste utilise toutes les ressources du «principe d’unanimité et de contagion» tel que le définit JM Domenach. Mais son arme principale est la force du montage du film. «Le metteur en scène a essentiellement 4 choses à sa disposition pour donner à un simple reportage cinématographique une forme artistique et une construction adéquate : l’architecture du film, le rythme du montage, une utilisation particulière duson et la qualité des prises de vues» affirme la cinéaste dans un article intitulé «Essence et mise en scène du film documentaire» paru en 1940 dans la revue cinématographique Der Deutsche Film. Quarante ans plus tard, elle précise de manière détaillée et prouve que le montage est bien un procédé technique qui donne du sens, et qui, ici, fait autant œuvre de propagande que la mise en scène du Congrès lui-même. «C’est le sens des transitions entre les plans, de l’enchaînement entre un regard et un autre, entre un dégradé de valeur, de gris, et un autre. C’est-à-dire que c’est une conception musicale et ce qui est très important, c’est de faire culminer le film au bon moment, de sorte qu’il y ait une montée constante. […] Naturellement on a du faire des centaines d’essais au montage qui a duré plus de 5 mois. Au début c’était 12 heures de travail par jour, puis ça a été 14, puis 18 et à la fin c’était 20 heures par jour ! C’est dire que je n’ai rien pu faire d’autre pendant ce temps que de rester assise à la table de montage et d’essayer de trouver une solution pour qu’il n’y ait pas d’à-coup, que ce soit fluide et que ce soit intéressant. Il a fallu pour ça des centaines d’essais»<36>Interview accordée à Ray Müller, , Le pouvoir des images … , op. cit.. Le résultat fait du long métrage de Riefenstahl, qui reçut le Premier prix dans la catégorie documentaire à la Biennale de Venise et fut projeté à plusieurs reprises dans le cadre de l’Exposition universelle de 1937 à Paris, un film qui selon Franck Capra «n’utilisait ni fusil, ni bombe. Mais en tant qu’arme psychologique visant à détruire la volonté de résistance, ce film était tout aussi meurtrier».<37>Franck Capra, The name above the title : an autobiography, New-York, Macmillan, 1971, cité dans « 39-45. Cinéma d’un monde en guerre », Documentation photographique n°6024, août 1976
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Au total, il convient d’envisager ce que dit le cinéma, ce qu’il tait, ce qu’il suggère. Car les films de propagande n’assument pas tous ouvertement la gloire des institutions, des dirigeants ou des idéologies qu’ils servent. Le -bon ?- film de propagande peut se cacher sous des «appellations moins inquiétantes : film didactique, film d’édification religieuse, voire film édifiant ou film d’information»<38>Vincent Pinel, Ecoles, genres et mouvements au cinéma, op. cit., p 176 et même, ô comble, film de fiction tout simplement<39>Ce qu’a excellemment montré François Garçon dans De Blum à Pétain. Cinéma et société française (1936-1944), Le Cerf, 1984. S’appuyant sur quelque 600 films réalisés entre 1936 et 1944, l’auteur montre, extraits des dialogues de films à l’appui, que l’esprit de Vichy précède la Révolution Nationale, qu’il traverse et travaille la société française bien avant l’arrivée de Pétain au pouvoir.. C’est ainsi que des scénaristes hollywoodiens, après le 11 septembre 2001, sollicitent l’aide de la CIA et du Pentagone : deux films sortis sur les écrans en juillet 2002, Bad Company (de Joël Schumacher) et La Somme de toutes les peurs (dePhil Alden Robinson), sont le fruit de la collaboration entre Hollywood et les services secrets américains. Chase Brandon, agent au bureau des relations publiques de la CIA, explique -sans rire- quel est son rôle, dans le cadre de cette coopération : «Je m’occupe d’aider les réalisateurs de télévision, de cinéma et de documentaires qui veulent donner une image juste et impartiale de laCIA . Je réponds à leurs questions, je leur fais visiter nos bureaux, je leur arrange des entretiens et leur apporte tout le soutien logistique possible.»<41>Cf Samuel Blumenfeld, « Le Pentagone et la CIA enrôlent Hollywood », Le Monde, 24 juillet 2002 Véritablement, le film«agit comme un agent de l’Histoire», car «naturellement son action sociale et politique.s’exerceavecd’autant plus de force que les instances ou institutions qui en contrôlent la production ou la diffusion se veulent [ouvertement] porteuses d’une idéologie ».<42>Marc Ferro dans Dictionnaire des sciences historiques, ss dir A. Burguière, PUF, 1986, p 132
Mais le film peut aussi aider à «la constitution d’une contre histoire, non officielle, dégagée pour partie de ces archives écrites qui ne sont souvent que la mémoire conservée [de ces] institutions».<43>Marc Ferro, Cinéma et histoire, Gallimard, collection Folio, édition refondue 1993, p 13
Ainsi pour des fictions récentes sur les Indiens d’Amérique qui, à l’instar de Danse avec les Loups (Kevin Kostner, 1991) favorisent l’émergence de la cause indienne, en proposant une rupture avec plus d’un demi-siècle de westerns traditionnels qui offraient aux Américains et au monde l’image d’une épopée patriotique. Ainsi pour des reportages qui, à l’exemple de Pas vu pas pris (Pierre Carles, 1998)<44>Le film censuré et controversé de Pierre Carles (par ailleurs auteur de La sociologie est un sport de combat, long documentaire dans lequel s’incarne à l’écran la pensée de Bourdieu) que les chaînes de télévision françaises ont refusé de diffuser, a finalement trouvé un écho -et un succès commercial- dans les salles de cinéma. dérangèrent la bienséance d’images ordonnées et contrôlées, ou des montages documentaires comme Le Chagrin et la pitié (Marcel Ophuls, 1969)<45>Diffusé dès sa sortie en Allemagne, en Suisse et aux Etats-Unis, le film n’est projeté en France, dans quelques salles seulement, qu’en 1971. Il voit sa programmation à la télévision n’aboutir qu’en… 1981. qui firent date. « De simple illustration du passé, l’image s’élève donc au rôle d’acteur historique »<46>François Garçon, « Des noces anciennes », dans Cinéma et Histoire autour de Marc Ferro, CinémAction n°65, 1992 / 4, p 11 . De fait est -il souhaitable de « partir de l’image, des images. Ne pas chercher seulement en elles illustration, confirmation, ou démenti à un autre savoir, celui de la tradition écrite » : le film autorise alors une « contre-analyse » de la société, les images constituent la matière «d’une autre histoire que l’Histoire».<47>Marc Ferro, « Le film, une contre-analyse de la société ? », dans Cinéma et histoire, op cit, p 40
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