Torpilles sous l’Atlantique – 1957 – Twenty century fox

Casting :

Curd Jürgens : Von Stolberg
David Hedison : le lieutenant Ware
Robert Mitchum : le capitaine Murrell
Theodore Bikel : Schwaffer

Les films de sous-marins présentent la particularité de se dérouler, forcément, dans une sorte de huis clos, représenté par ce tube métallique dans lequel des hommes vivent, combattent, meurent parfois. Imaginée à l’époque moderne, développée pour la première fois pendant la guerre de sécession, par l’armée de la confédération, l’arme sous-marine contemporaine a vu le jour avant la première guerre mondiale.

Torpilles sous l’Atlantique – 1957 – sortie en France 1958

Les sous-mariniers ont été pendant longtemps regardés de haut par les marins de surface, et aujourd’hui encore, dans l’U.S. Navy, certains parlent de leurs collègues du service du silence, comme de ceux qui habitent dans un tuyau d’égout. À certains égards, pour les sous-marins de la première guerre mondiale, et pour le début de la seconde, l’image n’est pas si fausse que cela. La cale, permettant également le lest du bateau, était également la fosse d’aisance. Et si le sous-marin apparaît comme gracieux lorsqu’il est dans les profondeurs, en surface, il prend le moindre coup de mer, ce qui ne rend pas la vie facile à son équipage.

Aujourd’hui, dans toutes les marines des grandes puissances, les sous-mariniers sont plutôt considérés comme les meilleurs des sortants de l’école navale, tout particulièrement lorsqu’ils sont aux commandes de cette arme ultime que représente le sous-marin nucléaire lanceur d’engins. Dans ce cas, ce ne sont plus les torpilles, qui servent à la défense du sous-marin seulement, mais les missiles balistiques qui constituent l’arme principale.

Ce film de 1957 est basé sur l’opposition, le duel pourrait-on dire enfin capitaine de destroyer et celui de d’un submersible allemand, dans l’Atlantique sud pendant la deuxième moitié de la seconde guerre mondiale.

La bataille de l’Atlantique fait rage, les U-boot de l’amiral Doenitz cherchent à intercepter les convois alliés qui partent de la côte est des États-Unis vers l’Angleterre. L’essentiel des combats se déroule dans l’Atlantique Nord, mais dans les différents synopsis qui concernent ce film de 1957, l’Atlantique sud semble être le lieu de cet affrontement.

Cela peut s’expliquer au vu de la densité des convois, et de leurs destroyers d’accompagnement qui rendait la tâche des sous-mariniers allemands de plus en plus difficile. Par ailleurs, les différents modèles sortis des chantiers navals de Peenemüde disposaient d’une allonge de plus en plus importante, grâce à des moteurs diesels particulièrement sobres et efficaces. Des navires corsaires de transport permettaient également de remplir les soutes. Les torpilles à vapeur ont été utilisées, mais à partir de 1943, les torpilles à moteur électrique, moins cheres à fabriquer étaient embarquées sur les submersibles.

Ce film ne se déroule pas exclusivement à l’intérieur d’un sous-marin, puisque Robert Mitchum, le capitaine du destroyer fait assaut d’ingéniosité pour traquer son adversaire. On assiste d’ailleurs à des scènes de grenadage assez spectaculaires qui donnent une idée de la profondeur jusqu’à laquelle peuvent aller les submersibles de l’époque. La barre des 150 m en immersion peut être atteinte, la profondeur de destruction, celle à laquelle la pression finit par écraser le sous-marin se situerait en-dessous de 300 m.

Torpilles sous l'Atlantique
L’affiche originale avec le titre en anglais.

La profondeur d’attaque est en réalité l’immersion périscopique, à courte distance de la cible, puisque les torpilles le disposent que d’une portée limitée entre cinq et 7 km. Loin en-dessous de celle des canons qui équipe également les sous-marins, avec la pièce de pont, et bien entendu le destroyer. Curt Jurgens si l’on se base aux images du film semble à la tête d’un type VII, puisqu’il est armé d’un canon de pont. Cela peut surprendre car ce modèle, contrairement aux suivants, et notamment le type IX, avait un rayon d’action limité. On peut imaginer toutefois que pour les besoins de la cause, le sous-marin présenté dans le film ait été un type neuf modifié, équipé d’une tourelle. On distingue nettement dans la scène de fin, une pièce de 105 qui équipait déjà les submersibles de la première guerre mondiale. En réalité, le nombre de torpilles était plutôt limité, tandis que le canon de pont pouvait disposer de 300 à 400 coups.

Les deux personnages principaux, l’ancien commandant de cargo, coulé dans l’Atlantique, et le commandant de la Kriegsmarine ont une revanche à prendre avec leur passé. Le premier est animé par un esprit de vengeance, car sa femme est morte lors du torpillage de son bâtiment, pendant un convoi, tandis que le second, clairement hostile à ce qu’il appelle « la nouvelle Allemagne » cherche dans un affrontement final à effacer la honte de servir le régime nazi.
Il y a des mots très forts dans la bouche du Curt Jurgens : « une mauvaise guerre, une guerre sans honneur, une guerre sans Dieu ».

Torpilles vs blocus

Mais comme beaucoup de ces officiers de la Wehrmacht ou de la Kriegsmarine, le sens de l’honneur et du devoir les conduits à effacer de leur raisonnement la cause qu’ils servaient. Le blocus naval que l’Allemagne impériale a subi pendant la première guerre mondiale avait contribué à affamer la population. Et ce souvenir restait effectivement très fort. Briser le blocus, faire subir à l’Angleterre ce que l’Allemagne avait supporté pendant la guerre précédente, pouvait ainsi les motiver pour mener ce combat. On retrouve d’ailleurs chez le commandant de sous-marin cette ivresse de la chasse, alors qu’il est lui-même, avec son bâtiment, sous le feu des grenades de fond.

De la même façon Robert Mitchum, peu estimé par ses hommes au début du film, car de la marine marchande, se révèle comme un tacticien hors-pair.
On notera au passage, même si cela peut s’expliquer dans le contexte de l’époque retracée, qu’il n’y a pas le moindre personnage féminin dans ce film, même pas une auxiliaire de santé, ou la moindre infirmière. C’était évidemment la règle dans les sous-marins, et de façon générale dans la marine, jusqu’à une époque assez récente.

L’affrontement final, malgré l’intensité des combats, se termine par un happy end. Des blessés certainement, avec une main amputée par le rail des grenades sous-marines, un bras arraché dans la salle des machines par l’impact de la torpille, un mort que l’on rend la mer à la fin du film, nous sommes loin des scènes de massacres des films plus récents.

Le capitaine du destroyer blessé à mort parvient à éperonner le sous-marin ennemi. Mais il finit par sauver son adversaire. Les équipages se retrouvent pour rendre hommage à leurs morts pour la scène finale.

On peut conseiller le visionnage de ce film, même si l’intrigue n’est pas d’une grande complexité. Elle permet d’avoir une vision tout de même assez réaliste des conditions de vie dans ces bâtiments de la seconde guerre mondiale. Les équipages vivent dans la promiscuité, dans des espaces fermés, et on oublie souvent que même aujourd’hui, dans des engins submersibles ultramodernes, la bannette chaude reste la règle pour les matelots. Le même couchage est utilisé en permanence en fonction des quarts, et seul le capitaine et son second disposaient alors d’un espace privé isolé par un simple rideau.

L’histoire est finalement assez binaire, et rappelle bien le schéma hollywoodien de cette époque, que l’on retrouve dans les westerns avec le règlement de compte final dans l’unique rue de la cité. Dans ce film, l’océan est le théâtre du combat, mais la démarche reste évidemment la même pour aboutir à la rencontre finale montre deux hommes prisonniers de leur destin et de leur devoir. Le commandant de sous-marin regrette toutefois de ne pas être mort au combat, sans doute pour rejoindre le paradis des guerriers.

USS Greyhound – La Bataille de l’Atlantique

Torpilles sous l’Atlantique (1957)
The Enemy Below

PS: À propos de la critique du film que j’ai trouvé sur le lien ci-dessus, censée se situer sur un site de référence, je ne peux que regretter la pauvreté de l’argumentaire, sans parler d’un style pour le moins discutable. On se dispensera aussi de la publicité envahissante générée par les cookies. 

 

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