Requins d’acier, dont le titre original est crash dive fait partie de ces films de propagande sortis pendant la seconde guerre mondiale, et qui ont vocation à mettre en avant les qualités de la marine américaine, avant même les turpitudes de l’ennemi.
L’action se déroule dans l’Atlantique, sans autre précision, et sans que le contexte de la bataille de l’Atlantique ne soit rappelé. Un lieutenant de vaisseau, à la tête d’un torpilleur, un navire hors-bord armé de deux torpilles et de quelques lance-grenades de fond, se retrouve muté comme commandant en second d’un sous-marin.
Ce sous-marin éclaireur, appelé le corsaire, Corsaro dans la version disponible en DVD de ce film doublé en italien, avec des sous-titres en français, n’est pas assigné à la mission de protection des convois lors de la bataille de l’Atlantique. Il mène une guerre de course, ce qui explique son nom, à la recherche de navires marchands ennemis.
Une guerre de course
Certains de ces navires marchands, en réalité des cargos armés, pouvaient évoluer, sous un faux pavillon.
L’intrigue est d’une simplicité biblique, surtout lorsque l’on connaît les apparitions à l’écran du personnage féminin incarné par Anne Baxter, qui a joué dans Ève et les 10 commandements. Pour écrire net, ce film est un véritable nanar dans lequel la seconde guerre mondiale sert de toile de fond à un triangle amoureux.
Le lieutenant de vaisseau Ward Stewart, incarné à l’écran par Tyrone Power poursuit de ses assiduités, avec une constance et une lourdeur qui lui vaudrait aujourd’hui un procès pour harcèlement sexuel, une enseignante de lycée de jeunes filles, qui finit par lui succomber.
Malheureusement, le commandant Dewey Connors, incarné par Dana Andrews est amoureux de la même femme qu’il cherche à épouser. Évidemment, les deux prétendants se retrouvent à bord du même sous-marin, et ils doivent mener ensemble de périlleuses aux opérations qui associent combats navals et opérations commando.
On retrouve dans ce film un certain nombre de préjugés de l’époque, notamment avec le matelot noir, qui n’a pas besoin de camoufler son visage lors de l’infiltration à terre, et qui sert parfois de souffre-douleur et de confident au maître d’équipage.
Cette vision de la guerre, fraîche et joyeuse, se déroule dans un univers plutôt confortable, entre le lycée pour jeunes filles huppées où enseigne l’héroïne et des mess pour officiers particulièrement luxueux.
Requins d’acier vs croiseurs auxiliaires
Parmi les éléments intéressants historiquement pour le film, on notera la mise en avant d’un cargo corsaire, armé par la Kriegsmarine. Construit à partir de bâtiments de commerce, ces cargos pouvaient dissimuler dans leurs flancs des pièces d’artillerie de marine, et éventuellement lancer des torpilles. Parfois sous faux pavillon ils pouvaient s’infiltrer dans les convois alliés avant de couler les navires de transport faisant route vers l’Angleterre.
L’Orion et le Kormoran sont les plus connus de ces croiseurs auxiliaires construits à partir de navires de transport.
Dans le film, le commandant et son second font assaut d’ingéniosité pour finir par couler l’un de ces cargos armés, une fois le sous-marin en immersion, ce qui lui permet, par une ruse que l’on évitera de dévoiler, de tromper son adversaire. Les deux hommes, le commandant farouche défenseur des sous-marins, son second très attaché aux torpilleurs rapides, finissent par s’estimer, jusqu’à ce qu’ils ne découvrent qu’ils aiment la même femme, l’institutrice Jean Hewlett.
Celle-ci dont l’attitude est assez ambiguë, recherche à la fois la sécurité auprès du commandant, et en même temps la passion auprès de son second.
Opposés sur le plan sentimental, les deux hommes avec leur équipage sont chargés d’une mission particulièrement périlleuse, neutraliser une base terrestre allemande, installée sur une île de l’Atlantique, probablement à proximité des Açores.
Les scènes de combat sont assez intéressantes d’ailleurs puisque l’on y découvre les aménagements anti sous-marins que l’on peut trouver dans les ports, et notamment les filets, qui sont déplacés par des remorqueurs lorsqu’un navire ami pénètre dans la rade, et les champs de mines.
Commandos de marine
On découvre à cette occasion que les sous-marins peuvent mettre en œuvre des commandos, aujourd’hui un personnel spécialisé, et formé en conséquence, comme les Navy Seals ou le commando Hubert pour la marine française. Pour cette action menée pendant la seconde guerre mondiale, c’est l’équipage du sous-marin lui-même qui se charge de la mission de démolition des stocks de carburant, tandis que le submersible, installé au milieu de la rade lance toutes ces torpilles sur les navires à l’accastillage.
Le commandant en second Ward Stewart, chef du commando remplit sa mission, tandis que le commandant du navire, pour sauver son bâtiment, s’installe sur le kiosque pour remplacer le périscope détruit par un tir d’artillerie et permettre aux sous-marins de s’échapper en mer libre. Il est bien entendu blessé grièvement, les deux hommes se réconcilient, et le lieutenant de vaisseau Ward Stewart peut épouser sa belle institutrice qui porte pour l’occasion un manteau de vison qui laisse rêveur sur les traitements du personnel enseignant de cette époque. On évoquera à cette occasion le gel du point d’indice pour les personnels enseignants en France.
Ce film est un sympathique nanar qui se termine par une sorte de morale; le marin issu de la flotte de surface reconnaît aux sous-marins, ces fameux tuyaux d’égout, d’immenses qualités opérationnelles, et il associe dans un message final une ode à la gloire de la marine américaine qui vient terminer le film.
Soyons clairs, entre l’usage immodéré du tabac, la drague un peu lourde du personnage principal, l’expression un peu nunuche de l’héroïne, le préjugé sur le bon noir qui assume lui-même le terme de « négro », les adeptes du politiquement correct, et surtout de l’anachronisme auraient matière à une ribambelle de procès en sorcellerie. À moins que l’on ne puisse en faire un à l’auteur de ces lignes qui a passé un bon moment dans cet univers un peu kitsch.
Disons que les institutrices sur la côte Est des États-Unis dans les années 40 avaient certainement obtenu des revalorisations indiciaires insoupçonnées.
C’est vrai que le coup du manteau en vison, ça fait rêver. En ce qui me concerne mon objectif c’est la Bentley tchétchène.