Douce France – Un film de Geoffrey Couanon

Les espaces urbains de l’agglomération parisienne (Géographie) / Acteurs en conflit dans la métropole (Géographie) / Comprendre les enjeux d’un travail d’enquête (EMC)

Les Clionautes ont vu pour vous

Europa city

Ce film documentaire repose très largement sur la collecte des témoignages par les lycéens de la Seine-Saint-Denis qui mènent une enquête sur le projet Europa City.
Ce complexe commercial et de loisirs dont l’emprise représenterait 230 000 m² aurait pour conséquence la disparition de 280 ha de terres agricoles dans une des régions parmi les plus productives de France.

Le film montre avec une incontestable pertinence les attentes de ces jeunes, lycéens pour la plupart, à propos de leur avenir. Devenir autonome, bien gagner sa vie, faire un métier intéressant, ces souhaits s’expriment largement. Paradoxalement, avant qu’ils ne soient amenés par leur professeur de géographie à réaliser cette enquête, leur « sens du territoire » ne semble pas vraiment développé. Le jeune Sami par exemple qui pratique le jogging envisage tout naturellement d’en partir. Ses camarades comme Jennyfer voient dans ce centre commercial une opportunité de shopping.

Pourtant, au fur et à mesure de l’enquête de terrain, au contact des habitants de cet espace, dans ce triangle de Gonesse, les masques tombent.
Le film commence par une présentation municipale du projet, qui met l’accent sur les loisirs, y compris des pistes de ski artificiel, les créations d’emplois. De quoi susciter l’intérêt de ces jeunes d’une cité HLM qui n’y voient toutefois que des métiers de dépannage.
On est parfois étonné de l’attitude très en retrait de l’enseignante, même si elle semble plutôt favorable au projet, dans ces échanges après une réunion municipale, avec des opposants.

Ces opposants qui sont-ils ? Un gros agriculteur qui cherche à défendre son activité, mais aussi des retraités pour qui la création d’un centre de ce type remettrait en cause leur tranquillité.
L’attitude des commerçants de centre-ville semble plus nuancée. Si la patronne du café de la place semble favorable, le tenancier de la boutique multiservices, clés et cordonnerie, semble beaucoup plus mesuré. Il évoque sans fard la saturation des centres commerciaux dont le développement fait mourir les centres-villes.

Les lycéens vont interroger la députée LREM à propos de ce projet. La députée est favorable aux limitations mais en même temps il faut penser aux potentiels du territoire. La députée est favorable au sponsoring par Europa City. La lycéenne est quand même ébranlée.

Ces jeunes gens se révèlent forcément attachants, par les interrogations qu’ils portent, par leur enthousiasme aussi à propos des solutions alternatives à ces projets qu’il voient naître et qui finalement s’imposent à eux.

Parmi les solutions alternatives, lorsqu’ils évoquent les espaces inoccupés et pourtant déjà construits, ils découvrent celles des défenseurs de l’environnement qui cherchent de nouveaux lieux ou développer des activités, mais aussi de logement.

On se heurte évidemment à différentes problématiques. Les grandes sociétés du bâtiment et des travaux publics, les gros investisseurs, sont en quête d’opérations de grande taille, permettant une valorisation rapide du capital. Vendre un projet de ce type présente l’intérêt quasiment immédiat de promouvoir des emplois, mais peut-être faut-il s’interroger sur leur qualité.

En même temps, peut-on revenir en arrière et revenir à des productions dont l’impact sur l’environnement serait tout aussi important, voire supérieur ?

En matière d’habitat, la préoccupation de la mixité sociale revient régulièrement. Et le côté rafraîchissant de ces jeunes lycéens c’est qu’ils ne semblent pas avoir conscience du niveau de fracturation de notre société. Peut-on d’ailleurs parler de faire société aujourd’hui ?

Mon avis serait plutôt nuancé sur ce film documentaire qui prend évidemment en compte des témoignages mais qui ne permettent pas vraiment de se faire une opinion nuancée.

On tombe bien souvent dans la facilité avec forces images de pelleteuses qui déplacent des centaines de mètres cubes de terre. En même temps, et même si du point de vue environnemental, la création de pistes de ski artificiel peut sembler incongrue, les besoins d’espace de commerce, de logement, s’imposent tout naturellement aux communes qui sont en charge de fournir un cadre de vie aux habitants.

On touche là du doigt les limites de la démocratie représentative qui ressemble d’ailleurs à une démocratie d’opinion. Mais cela ne vaut pas responsabilité, lorsque l’on a un territoire à gérer et à aménager.

Dans les entretiens avec les politiques, cette vision des choses n’apparaît pas directement, dans ce brouillard de témoignages contradictoires, maladroitement exprimés, mais également nuancés.


La présentation par Zéro de Conduite

Menez l’enquête avec les lycéens de DOUCE FRANCE et découvrez notre coup de cœur de la fin d’année !

Dans ce documentaire, le cinéaste Geoffrey Couanon a suivi une classe de lycéens de Seine Saint Denis qui enquêtent sur un grand projet d’aménagement contesté, le complexe Europacity. Drôle, tonique et très pédagogique, ce documentaire est riche de possibilités d’étude avec les classes (Géographie, EMC, SES, SVT).

Nous lui avons consacré un dossier pédagogique téléchargeable en ligne.

Il est possible d’organiser des projections pour vos classes dans les cinémas, dès maintenant puis à partir de la rentrée de septembre
Qui plus est, le cinéaste participera à de nombreuses avant-premières et ciné-débats dans toute la France, et serait ravi de rencontrer des classes à cette occasion. Toutes les informations ici

Douce France – L’enquête

Douce France Europa City

Il s’agit de l’un des paradoxes les plus cruels de nos sociétés démocratiques : ceux qui auront à vivre le plus longtemps avec les conséquences des politiques actuelles sont aussi ceux qui prennent le moins de part à leur élaboration…
Partout dans le monde, le taux de participation aux élections et l’engagement dans les instances de la vie démocratique dégringolent à mesure que l’on descend la pyramide des âges. Mais la situation est peut-être en train de changer, à mesure que se conjuguent la demande citoyenne pour plus de participation et la prise de conscience par la jeunesse mondiale des enjeux écologiques.

À leur échelle, les héros de Douce France de Geoffrey Couanon, participent de ce mouvement : en menant l’enquête sur l’un de ces « grands projets structurants » promis à dessiner le visage de la France de demain (le pharaonique complexe EuropaCity), Amina, Sami et Jennyfer et leurs camarades deviennent pleinement citoyens et acteurs
de leur territoire (le Nord-Est de l’Île de France). Aussi drôle et touchante qu’instructive, leur enquête, filmée « comme un western » par Geoffrey Couanon, propose une formidable matière pédagogique : à travers ce projet d’aménagement s’imbriquent en effet une multitude d’échelles (locale, régionale, internationale), d’acteurs  (économiques, politiques, citoyens) et d’enjeux (géographiques, économiques, sociaux, environnementaux et démocratiques). Le film propose autant
d’entrées vers les programmes du Collège (à partir de la Troisième) et du Lycée, tout en permettant aux élèves de s’identifier aux réflexions d’Amina, Sami et Jennyfer sur le sens et le lien de leurs futurs métiers au territoire.