Afghanistan – Un film d’animation qui interpelle sur la condition des femmes dans les sociétés traditionnelles.
Synopsis Kaboul, Afghanistan, 2001. Herra est une jeune femme d’origine tchèque qui, par amour, décide de tout quitter pour suivre celui qui deviendra son mari, Nazir. Elle devient alors la témoin et l’actrice des bouleversements
que sa nouvelle famille afghane vit au quotidien. En prêtant son regard de femme européenne, sur fond de différences culturelles et générationnelles, elle voit, dans le même temps son quotidien ébranlé par l’arrivée de Maad, un orphelin peu ordinaire qui deviendra son fils…
Les Clionautes on vu le film
Les films d’animation tchécoslovaques ont été largement diffusés à l’ouest pendant la période de la guerre froide. S’ils étaient soumis à la censure caractéristique du bloc communiste, on pouvait trouver parfois un message assez critique sur le système, mais surtout une grande poésie qui permettait sans doute d’échapper à la grisaille ambiante, surtout après la répression du Printemps de Prague.
Ces films étaient largement diffusés en France, notamment dans les ciné-clubs, particulièrement dans les collectivités territoriales dirigées par le parti communiste français.
On pourrait citer le très beau film de 1952, « le trésor de l’île aux oiseaux », de Poklad Ptacího Ostrova mais également « le songe d’une nuit d’été » très surprenant par les choix d’adaptation d’une pièce de Shakespeare.
Ce film sorti en 2021 s’inscrit dans cette tradition, même si la Tchécoslovaquie a connu la partition qui a suivi la révolution de velours de 1989.
Cette histoire raconte la vie d’une jeune tchèque qui quitte son pays pour suivre l’amour de sa vie, ressortissant afghan et économiste, dans la période où les forces occidentales cherchent à construire une nation, interpelle à différents niveaux.
L’action se situe au moment où Oussama Bin Laden a été tué par un commando des forces spéciales américaines au Pakistan. La présence occidentale se manifeste par des bases militaires mais également des représentants d’associations humanitaires qui doivent composer avec les traditions du pays.
Mais au-delà du contexte géopolitique, qui est largement développé dans le dossier pédagogique, particulièrement solide qui est fourni, c’est une véritable « histoire de famille » qui nous est donnée à voir.
Il n’y a rien de manichéen dans ce film, et c’est en cela qu’il est « dérangeant ». Il pose des questions qui relèvent parfois de l’intime, jusqu’où l’amour peut nous conduire par exemple ? Les personnages sont très loin des caricatures que l’on pouvait craindre. Nazir, l’époux de Herra, se trouve sur une ligne de crête entre son amour sincère pour cette jeune femme et la pesanteur des traditions familiales qui s’imposent à lui. Il franchit parfois la limite d’ailleurs, lorsque son épouse choisit de travailler avec des occidentaux.
L’amour maternel, pour cet orphelin recueilli dans la famille élargie se manifeste également. Les femmes, mises à l’écart, investissent dans leurs enfants leur rêve. Mais le jeune orphelin recueilli présente quelque handicap, ce qui en fait un personnage à part.
Les femmes manifestent une forme de résistance, autant qu’il est possible, face au poids des traditions que les hommes de la famille cherchent à imposer. On notera d’ailleurs l’ambivalence dans leur comportement, à la fois puritain et hypersexualisé.
Cette famille élargie voit s’opposer en son sein des traditionalistes et des progressistes. Les deux grands-parents qui ont connu la période antérieure semblent dépités par rapport à cette réactivation des traditions les plus rigoureuses. Ce sont les hommes, déclassés socialement, qui expriment leur mal-être en imposant à leurs épouses une forme d’enfermement. La violence est sous-jacente, l’idéologie des talibans pénètre peu à peu cette famille, par l’intermédiaire d’un cousin, marchand de poules.
On retrouvera également le drame de ces mariages précoces avec la fillette que l’on veut livrer à un barbon de 40 ans. Celle-ci d’ailleurs parvient à fuguer et à se réfugier au sein de la minorité hazara, les chiites afghans. L’une des femmes de la maison finit d’ailleurs par s’enfuir également avec le médecin de l’O.N.G. tandis que Herra, par amour pour son fils adoptif, choisit de rester.
Le spectateur espère pourtant son départ, jusqu’au dernier moment. L’émotion est omniprésente, et on oublie qu’il s’agit d’un film d’animation, tant l’histoire est prenante. Les dialogues aussi, ciselés, et en même temps touchants par leur sincérité.
Il faut aller voir ce film, il faut le montrer, car au-delà de la situation spécifique de l’Afghanistan, il peut aussi ouvrir à de nombreux questionnements. Disons clairement les choses, même si dans le monde occidental en général, en France en particulier, la situation des femmes n’a rien de comparable avec les conséquences du poids des traditions dans un pays comme l’Afghanistan, il existe pourtant des questions qui doivent se poser.
Car dans l’histoire de cette jeune tchèque qui rencontre l’homme de sa vie, se pose la question qu’il faut aborder sans tabou des unions mixtes et des rapports hommes femmes qui en découlent.
Épouser un homme d’une autre culture cela peut-être, comme dans le cas de l’héroïne du film subir, au-delà de la culture de son époux, le poids de traditions omniprésentes.
Ce film traduit aussi, même de façon indirecte, l’échec de 20 ans d’intervention occidentale, où l’on a voulu construire une nation tout en composant avec une population farouchement attachée à ses traditions.
Mais dans le même temps, c’est aussi oublier que l’Afghanistan n’a pas toujours été ce pays où les femmes étaient considérées comme inférieures. Dans les années 70 l’Afghanistan a été ce pays que l’on traversait, sur la route de Katmandou, en quête de paradis artificiels. Les convulsions de l’histoire, les intérêts géopolitiques, ont fait de cette terre, toujours et encore cimetière des empires, un terrain de guerre pendant un demi-siècle.
Lorsque l’on voit défiler le générique de fin on se prend à espérer que Herra aura pu partir, fuir la chape noire que les talibans ont apposée sur le pays depuis août 2021.
Et on se met à faire le lien avec cette chape de plomb qui s’est abattue sur la Tchécoslovaquie après le Printemps de Prague.
C’était en août 1968.
Peut-être un jour Herra pourra montrer son visage et ses cheveux blonds. En ce moment c’est la Burka qui les recouvre.
Le dossier pédagogiqueFESTIVAL D’ANNECY 2021 Prix du Jury
Réalisation : Michaela PAVLÁTOVÁ
Production : SACREBLEU PRODUCTIONS, Ron DYENS, NEGATIV S.R.O.,
Petr OUKROPEC, BFILM, LTD., Peter BADAC
Distribution : DIAPHANA DISTRIBUTION
Scénario : Ivan Arsenjev, Yaël Giovanna Lévy
Musique : Evgueni Galperine, Sacha Galperine
Montage : Evženie Brabcová
POUR ORGANISER UNE PROJECTION SCOLAIRE
1. Contactez la salle de cinéma la plus proche de votre établissement – si vous n’avez pas le contact, n’hésitez pas à
nous le demander à cette adresse : diaphana@diaphana.fr
2. Demandez au responsable de la salle les modalités pour organiser une séance scolaire : tarifs, disponibilités de
la salle…
3.Toutes les salles de cinéma sont susceptibles d’organiser une projection pour les scolaires même si le film n’est
pas programmé dans la salle.
PLACE DANS LES PROGRAMMES INTÉRÊT PÉDAGOGIQUE DU FILM p.4
Texte d’introduction de l’auteure Rachel Khan p.6
1/ L’AFGHANISTAN, UNE GUERRE DE 40 ANS
a) Chronologie de l’Afghanistan entre 1979 et 2021 p.7
b) L’Afghanistan, du départ soviétique à l’intervention de l’ONU p.8
c) Un pays perdu de vue entre 1988 et 2001 p.8
2/ 20 ANS DE GUERRE CONTRE LE TERRORISME ET L’ÉCHEC DE LA DÉMOCRATISATION « PAR LE HAUT »
a) Justifier la guerre p.10
b) L’intervention des Etats-Unis : une guerre asymétrique pour restaurer la démocratie p.12
c) Vivre dans un pays en guerre de 2000 à 2021 p.14
3/ L’AFGHANISTAN, UNE SOCIÉTÉ PAUVRE ET INÉGALITAIRE
a) Une société en crise prise entre éclatement et commerce de l’opium p.15
b) Des talibans aux talibans, 2001-2021 p.16
c) Fuir la guerre p.17
4/ LES FEMMES, ENJEU POLITIQUE
a) Être une femme en Afghanistan en 2022 p.19
b) Les droits des femmes en recul après le retour des talibans p.21
BIBLIOGRAPHIE / SITOGRAPHIE
Dans les programmes
Quatrième – Géographie
Thème 2 – Les mobilités humaines transnationales
Troisième – Histoire
Thème 2 – Le monde depuis 1945
• Enjeux et conflits dans le monde après 1989.
• Quelle est la nature des rivalités et des conflits dans le monde contemporain et sur quels territoires se développent-ils ? On cherchera quelques éléments de réponses à partir de l’étude d’un cas (on peut croiser cette approche avec le programme de géographie).
EMC cycle 4 : Les discriminations et les inégalités
Le jugement : penser par soi-même et avec les autres > Expliquer les différentes dimensions de l’égalité, comprendre
que toutes les inégalités ne sont pas discrimination mais que les discriminations sont une forme d’inégalité.
Terminale – Histoire Tronc commun
Thème 4 – Le monde, l’Europe et la France depuis les années 1990, entre coopérations et conflits
Chapitre 1. Nouveaux rapports de puissance et enjeux mondiaux
On mettra en perspective les nouvelles formes de conflits : terrorisme, conflits asymétriques et renouvellement de
l’affrontement des puissances.
Spécialité « Histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques »
Thème 2 – Faire la guerre, faire la paix : formes de conflits et modes de résolution
Axe 1 – La dimension politique de la guerre : des conflits interétatiques aux enjeux transnationaux.
Jalon 2 – Le modèle de Clausewitz à l’épreuve des « guerres irrégulières » : d’Al Qaïda à Daech.
Axe 2 – Le défi de la construction de la paix.
Jalon 2 – Faire la paix par la sécurité collective : les actions de l’ONU sous les mandats de Kofi Annan (1997-2006).