En terrain miné, ou l’art de disserter sur une expérience du combat, sans combats. Suite de ce voyage cinématographique autour de films abordant les guerres en Afghanistan. Chacun éclaire un jour différent du conflit, chacun, à sa mesure, participe à la construction d’une mémoire de ces drames. Le précédent article portait sur un regard de Hollywood sur le conflit soviétique à travers La bête de guerre de Kevin Reynolds, au moment même où l’URSS quittait l’Afghanistan. Voyons ce que nous réserve ce nouveau film.

De son vrai titre Kajaki, the true story, est une sorte d’ovni anglais assez improbable. Pourquoi fait-il partie de ce dossier ? Offre-t-il un regard historique neuf et décisif sur le conflit ? En vérité Kajaki offre autre chose, une expérience complètement singulière. Seul le film de Kevin Reynolds offre une expérience similaire : vivre, au ras du sol, la tension de la mort invisible et implacable de combats qui n’ont rien de glorieux.

 

À la guerre, le plus souvent, on s’ennuie

 

En terrain miné commence de façon très classique : un camp, une nouvelle recrue, des hommes qui s’ennuient, un pas que l’on maudit, des combats lointains, à peine perceptibles. Nous sommes à la limite de l’ennui lorsque, dans une fulgurance de mise en scène, tout bascule.

La guerre d’Afghanistan de Paul Katis est une adaptation d’un fait d’arme terrible. Une unité de lieu, une rivière sèche, pour un compte à rebours fatal opposant des corps de soldats à un adversaire implacable. Le danger est là, mais on ne le voit pas. On a le temps de reprendre espoir pour cette troupe que l’on suit avec appréhension, avance d’un centimètre de plus, avant qu’une nouvelle explosion nous écrase contre notre canapé.

Une plongée au cœur de l’absurdité de la guerre, dans ce qu’elle a de plus pathétique, dans ce qu’elle a de plus démente. L’ennemi ? Des Talibans ? Non, même pas. Des mines, soviétiques, qui attendent là depuis la fin d’une autre guerre, pour une nouvelle guerre. Une guerre au cours de laquelle on meurt sans se battre, pour une cause que l’on ne comprend pas, loin des siens. Un coup de poing viscéral qui nous écrase sous une lumière ardente, au cœur d’une poussière qui ne demande qu’à nous envelopper.

Comment résumer un film en une photo

 

Au même titre que Restrepo, voici un témoignage peu connu mais très percutant sur ce conflit.

 

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Fiche technique

Pukka Films / 2014 / 1h48 min / Guerre

Titre original Kajaki: The True Story, Kilo Two Bravo

Réalisateur : Paul Katis

Scénariste : Tom Williams

Musique : Phoebe Katis

Avec David Elliot, Mark Stanley, Scott Kyle