Compte-rendu de l’atelier des journées de la Durance animé par Dominique Chansel, professeur au lycée Duby à Luynes, formateur IUFM. Marseille, le 2 février 2006.

Ce sont avant tout des notes prises lors de l’atelier, sans mise en forme évoluée.

Introduction

Pendant l’occupation le cinéma français s’est assez bien porté, entre autre à cause de la disparition de la concurrence américaine. Mais avec la Libération c’est le retour du cinéma US avec la masse des films produits pendant la guerre dont l’intruduction est largement favorisée par les accords Blum-Byrnes du printemps 1946. A la libération, un autre cinéma s’en sort bien, c’est le cinéma italien qui hérite des réalisations fascistes (Cinecitta par exemple) pour produire non plus de la propagande mais de la fiction : c’est l’explosion du néo-réalisme.

Lors de son atelier Dominique Chansel a présenté cinq extraits :

– « Allemagne année zéro » de R. Rossellini, 1947.
– « Les portes de la nuit » de Marcel Carné, 1946.
– « Les plus belles années de notre vie » de William Wyler, 1946.
– « Le retour de Bortnikov » (la Moisson) de Vsévolod Poudovkine, 1952.
– « Le destin d’un homme » de Sergueï Bondartchouk, 1958.

A la fin de son intervention Dominique Chansel a très rapidement évoqué le cinéma et la résistance au lendemain de la guerre… mais cet article ne s’en fera pas l’écho.

« Allemagne année zéro » de R. Rossellini, 1947.

C’est le 3° film de R. Rossellini de l’après-guerre (après « Rome ville ouverte). R. Rossellini tourna sous le fascisme des oeuvres plus standards. Il poursuit son travail sitôt la guerre achevée. Le film a été tourné à Berlin en 1947 ; c’est une coproduction italo-française (ce qui explique que les autorisations aient été données). Quelques scènes ont été trounées en studio à Cinnecitta. Les acteurs sont non professionnels.

L’extrait correspond aux 5 premières minutes du film (de la fin du générique à la première scène dans l’immeuble).

L’objectif est de faire dégager à la fois les informations que l’on peut obtenir de la situation de l’Allemagne à la fin de la guerre mais aussi de cerner les « partis pris » du cinéaste car même le néoréalisme a des partis pris.

R Rossellini a voulu se rapprocher du documentaire : une image peu contrastée (ex. lumière naturelle) ; maintien des langues maternelles.

– 1ers plans, 1 minute 24 d’un long travelling : 2 ans après la guerre Berlin est loin de la reconstruction mais les axes de circulation sont dégagés (on ne voit pas de voitures par contre) ; on voit le dôme du Reichtag mais le plan est coupé très vite pour laisser la place à la scène du cimetière.
– 48 s : le cimetière : les femes creusent des tombes (c’est une métaphore assez lourde) : des femmes, des vieux, un enfant mais pas d’hommes… Le plan rapproché sur l’enfant et le groupe des femmes ne montre aucune compassion de celles-ci pour l’enfant : celui-ci est rejeté par le monde d’adulte tout au long du film. Historiquement il est exact que de nombreuses bandes d’enfants abandonnés erraient dans le Berlin en ruine. Apparaissent aussi dans ces scènes les difficultés de la survie, 2 ans après la fin de la guerre.

Le réalisateur prend le parti pris de montrer le point de vue de l’enfant (Berlin à travers les yeux de l’enfant). R Rossellini se revendique comme chrétien : le film porte sur la culpabilité et montre des adutes allemands qui n’assument pas.

« Les portes de la nuit » de Marcel Carné, 1946.

On est dans le réalisme poétique… Ce fut un gros échec : ce qui a marché avant guerre ne fonctionne plus après. L’action se passe en février – mars 1945.

L’extrait projeté correspond à la 2nde séquence.

Ce film est solidement ancré dans le réalisme des annéeés trente : ainsi au coté de Yves Montand on retrouve Raymond Bussière, l’archétype du prolo-titi des années 30/50. On a aussi le tournage en studio ; les dialogues ciselés ; etc.

La vie quotidienne de l’immédiat après-guerre est visible : enfants avec galoches ; la cours ; la rue vide ; les pénuries ; etc. On a aussi une allusion aux profiteurs de guerre (le personnage à beret).

Ce film est aussi un témoignage de la mémoire de la résistance immédiatement après la guerre : allusion aux résistants communistes (photo de Staline vue fugitivement) ; il y a des traîtres ; la rue H. Martin (Gestapo) ; les auxilliaires de l’occupant (Constantini, flic corse) ; la torture (sans pathos) ; allusion aux étrangers dans la résistance (Diego = Y Montand).

Mettre aussi en évidence la vision de la femme : bonne ménagère.

« Les plus belles années de notre vie » de William Wyler, 1946.

L’extrait couvre environ 10 minutes depuis la scène de bar jusqu’au retrouvailles du marin et de sa famille. Le film porte sur le retour de 3 soldats vers les Etats-Unis à la fin de la guere.

La vision des EU d’après la guerre, un pays épargné par la guerre (voitures ; magasins ; insousiance ; vètements ; lumières omniprésentes ; golf ; ). La vie a continué. On constate aussi l’immensité du potentiel industriel militaire (centaines d’avions attendant d’être détruits) à reconvertir vers la paix.

Le film pose donc la question du retour et de la réinsertion (remarque : le personnage du marin est incarné par un vrai mutilé de la guerre du Pacifique). Pas d’étalage d’exploits guerriers : ils ne seront pas des anciens combattants, seulement des hommes désireus de revenir à la vie qu’on a quitté.

« Le retour de Bortnikov » (la Moisson) de Vsévolod Poudovkine, 1952.

L’extrait se situe au début du film.

C’est l’histoire du retour d’un soldat après des années de guerre et d’hospitalisation qui trouve « la place prise » (sa femme avec un autre homme). C’est un paysan (population majoritaire). Le retour se fait à pied par nuit noire.

C’est une production étatisée typique du réalisme soviétique. Le cinéaste Poudovkine est un des rares survivants de la génération Eisenstein des années vingt qui fait des films Staliniens. Ce film sera très vite diffusé en France sous les applaudissements de la critique communiste (les Belles Lettres).

« Le destin d’un homme » de Serguéï Bondartchouk, 1958.

L’extrait se situe vers la fin du film.

C’est un film du dégel Khrouchtechévien : on y montre des choses inimaginables sous Staline, un enfant en guenilles dans un décor asse minable ; un héro malheureux qui ne partage pas le bonheur collectif de la victoire. Mais ce film montre aussi la violence faîte au peuple russe.

A remarquer un fin humaine et chaleureuse.

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L’avis de Cinéhig

Un atelier de grande qualité, intellectuellement et pédagogiquement stimulant. Dominique Chansel a, à chaque fois, proposé des approches de ces extraits qu’il a mené en classe, avec ses élèves (à noter des élèves avec option « histoire de l’art » »).

Extraits

Les extraits de R Rossellini et W Wilder sont formidablement riches et utilisables sans retenue en classe . Je suis moins enthousiaste sur l’utilisation en classe de l’extrait de M Carné tant il me parait suranné ! Enfin l’extrait du film de Poudovkine ne m’a pas du tout convaincu : mais à vous de voir !

Par contre une lecture croisé des 4 extraits (à condition de réduire chacun d’eux à 2 minutes maximum) me parait très intéressante avec une problématique (plutôt en terminale) sur les lendemains de guerre.

En savoir plus

– Lire, de Dominique Chansel : « L’Europe à l’écran : le cinéma et l’enseignement de l’histoire« , Éditions du Conseil de l’Europe, 2001. Cet ouvrage est à la croisée de deux tendances actuelles de notre enseignement : des programmes de plus en plus européens et des recommandations nous invitant à diversifier nos supports pédagogiques.

– « La Moisson »

Vsévolod Poudovkine

Marcel Carné ou sur Voila

William Wyler sur Allo Ciné

– « Les plus belles années de notre vie » sur CommeAuCiné.

Sergueï Bondartchouk

– « Le destin d’un homme » :

Roberto Rossellini, une passion didactique

– « Allemagne année zéro » :