Hercule …. Tout un programme ! Et bien moi j’aime le pulp, j’assume et je valide ! La Pop Culture a toujours quelque chose à offrir : au pire l’évasion dans la sinistrose ambiante, même si cette évasion implique d’éteindre son cerveau. Parfois, souvent selon notre capacité à aller creuser un peu derrière le verni, il est aussi possible d’y trouver quelques idées et leçons à méditer. 2023 a commencé comme 2022 a fini, assez lourdement. Alors ces films sont aussi l’occasion d’ouvrir une fenêtre temporelle fugace pour passer un bon moment.

 

 

Mon travail d’Hercule : défendre ce film

 

Voici venu le temps d’affronter la tempête. Héraklès, puisse Héra me laisser défendre ce petit film sans qu’une Hydre débarque dans mon humble demeure. Attention aux quelques spoils obligatoires pour analyser un peu le film. Si vous comptez le voir lisez ce modeste billet après.

Au regard des critiques qui ont accompagné et accompagnent toujours cet opus de Brett Ratner, je n’ai que peu d’alliés à mes côtés pour le défendre. Et bien je vais tout de même le faire. Après tout, l’ayant revu alors qu’autour de nous le monde se convulse vers un destin qui ne semble pas propice aux jours heureux, il m’a fait du bien.

 

Commençons par dissiper quelques malentendus ….

Je vais commencer par dissiper tout doute quant à ma folie naissante ; non, cet Hercule n’est pas un grand film. Non, il ne sera pas un film culte. Non, je n’ai pas été ébloui ou ressenti mes poils se dresser à l’instar d’une Battle of the Mounds conanienne. En 2014, pénétrant dans la salle de cinoche avec mon compère cinéphile, je savais ce que j’allais voir : un blockbuster estival vendu par une bande-annonce très bien foutue et donc ultra suspecte. Dwayne Johnson en tête d’affiche c’était, au-delà du physique parfait, un risque majeur. Et bien quand je suis sorti de la salle j’étais heureux et surpris. 2023 : rien n’a changé. Alors par tous les dieux, il faut le défendre ce film de fin d’été.

 

Les bonnes idées : le synopsis et le casting

Le concept est assez enthousiasmant : cet Hercule sera historique. 5 minutes de fantastique et de légende avant que le charme de l’aède ne retombe. La Grèce, le IVè siècle. Exit le demi-dieu, bonjour le mercenaire. Non, le chef de bande. Car là où Héraklès du accomplir ses exploits le plus souvent seul, celui-ci sera accompagné d’une bande de soudards improbables. Un spartiate beau gosse et taquinant à merveille le fer joué par un crédible Rufus Sewel, un devin à moitié cramé qui aurait eu sa place dans Fringe aux côtés de Walter Bishop campé par un assez jouissif Ian MacShane. Une belle amazone, cette chère Ingrid … faire valoir féminin ? Non, je n’ai pas trouvé d’autant que l’écho aux légendes est bien vu. Reece Ritchie en aède qui ne sait pas se battre mais est si important pour les combats, Askel Henny en berserker traumatisé … quelle belle surprise !

 

Aucune faute de goût dans ce casting

Cette fine équipe accompagne donc justement un Dwayne Johnson que j’ai senti habité. Immédiatement on sent que c’est un peu le rôle de sa vie. Cet Hercule est humain. La première confrontation donne le tempo : rythmée, sans fioriture, sans merveilleux, cet Hercule n’est pas un demi-dieu. Non, on ne va pas voir une version mythologique ; l’ambition est justement plus modeste. La légende se mue en une sorte de chef de famille perdu, torturé par ses démons intérieurs à savoir la perte de sa femme – sublime – et de ses enfants. C’est le phare que suivent une bande de laisser pour compte de cette Grèce antique assez bien rendue. Un type costaud mais normal, qui joue de la légende qu’on lui a collé sur le dos pour trouver un endroit où finir sa vie. Alors, en attendant, il joue aux mercenaires.

 

Binaire ? Oui, et alors ?

 

Alors oui, c’est manichéen car les méchants finissent par être très méchants. Je vais être sympa je ne spoale rien au cas où des regards se seraient perdu jusqu’ici. Mais non de Zeus, c’est tout de même bien fichu ! La linéarité du début bascule au bon moment. Le final est très sympa. On a bien envie que les adversaires de nos héros paient le pris fort.

Et oui ! Réveillons-nous ! Nous sommes devant du BRETT RATNER avec DWAYNE JOHNSON !

Plutôt que de vomir, il faut tout de même prendre ce qu’il y a à prendre dans ce qui reste un pur pulp ! Moi, je n’avais pas ressenti ça depuis La Momie ou Le 13è guerrier. Un film d’aventure qui n’a d’autres ambitions que celle de nous distraire, de nous sortir de la morosité ambiante. Mieux, ce film le fait avec une certaine sincérité nimbée de maladresse. Les punchlines ne sont pas dantesques mais fonctionnent. On ne tombe pas en Charybde avec un 300 like. On ne bascule pas en Scylla avec un Hercule pour midinette, épilé, bronzé aux UVs, au charisme de poulpe. Les auteurs ont même la décence de nous éviter une histoire d’amour finale et un happy end mielleux. Cet Hercule nous touche dans ses démons intérieurs, par delà ses cauchemars. Il suinte et la crasse existe. On a même des figurants en lieu et place de erzats numériques dont on nous abreuve généralement.

 

Il faut savoir prendre le nécessaire temps du plaisir coupable

Alors oui, j’ai aimé revoir ce film. Oui, le final fini par basculer un peu dans le too much. Mais foutre d’Arès c’est une adaptation plutôt réussie d’un comic qui mérite d’être découvert ! Ce n’est pas la énième repompe d’un film fantastique à la mode reboot du Choc des Titans à base de « cette salope de méduse on va la bouffer » ! Ce n’est pas une catastrophe du type Légende d’Hercule avec son héros lisse, épilé et débile (je ne vois pas d’autre terme qui lui convienne, désolé).

 

Le comic original, paru entre mai et septembre 2008 chez Radical Publishing

 

 

Johnson livre une copie pleine de sincérité dans un film sans ambition particulière au-delà de la volonté de nous distraire au-delà de ses maladresses. La figure du héros, la folie d’Hercule, sont à peine abordées et auraient méritées d’être creusées avec plus de finesse car Hercule fini par être disculpé. Il manque de la noirceur, il manque la mise en place d’une véritable analyse de cet anti-héros par excellence. Ici tout est basique, drôle sans être lourd, ne se prend jamais au sérieux et au final on fait avec. On a même un concept intéressant autour de la nécessité pour les mortels d’avoir des héros en qui s’identifier pour se sublimer ou oublier.

Assurément le péplum « next gen » le plus sympathique que j’ai pu voir ces dernières années, renouvelant un peu un genre bien trop maltraité dans une simple veine aventurière que beaucoup aime tant vilipender.

Pourrait-on en faire une exploitation pédagogique ? Oui, pourquoi pas. Les aventures de cette troupe, finalement, pourraient permettre un travail en commun avec des collègues de lettres classiques. Dans un cadre plus large ce film serait aussi l’occasion de creuser le sillon des études des représentations de l’antiquité.

Merci Brett, Dwayne et toute votre fine équipe. Des plaisirs coupables de cette trempe non seulement j’assume, mais j’en redemande. Et tant pis si je suis tout seul ! J’ai pris plus de plaisir à le revoir ce film sans prétention qu’à suivre les cohortes de fans d’Avatar 2 …. Là je crois que je suis bon pour le bûcher.

 

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Fiche technique

États-Unis / 2014/ 1h 38min / Fantasy, aventures

Titre original Hercules

Réalisateur : Brett Ratner

Scénaristes : Ryan J. Condal et Evan Spiliotopoulos (d’après Hercules : The Thracian Wars, roman graphique scénarisé par le Britannique Steve Moore et dessiné par Admira Wijaya)

Musique : Fernando Velázquez et Johannes Vogel

 

Avec

Dwayne Johnson, Rufus Sewell, Aksel Hennie, Reece Ritchie