Le voyage extraordinaire

La présence et l’engagement des chroniqueurs de Ciné HG et de la Cliothèque permet un suivi attentif des projections presse et sorties de DVD de notre partenaire zéro de conduite. Après la présentation de Sandrine Saule, voici celle de Guillaume Bellichi.

Le chef d’œuvre de Georges Méliès ressort le 14 décembre dans une version couleur inédite et restaurée accompagné d’un documentaire de 65 minutes de Serge Bromberg et Éric Lange retraçant la carrière du réalisateur, et le long travail de restauration de la version couleur de son film.
La première partie du documentaire évoque Méliès et sa carrière passionnante, à travers des extraits de ses films, des images filmées du Paris de la « Belle époque » et des interviews de cinéastes français témoignant de leur admiration, tels Costa-Gavras, Michel Gondry ou bien encore Jean-Pierre Jeunet.

Ayant tout d’abord débuté par une carrière de magicien, Méliès s’intéresse aux possibilités techniques de l’invention des Frères Lumières et produit alors de véritables tableaux cinématographiques où se mêlent merveilleux et fantaisie. Il connait le succès en 1902 grâce au Voyage dans la lune. C’est un succès tel qu’il doit protéger sa production face aux nombreuses copies, notamment américaines, de ses créations. Pionnier de l’industrie cinématographique, il fonde sa propre compagnie afin de défendre ses intérêts outre-Atlantique. Toujours novateur, il crée également un studio de cinéma dans sa propriété au cœur de Montreuil et tourne des films en couleur. Ils sont en effet colorisés grâce au travail d’une chef d’entreprise francilienne dirigeant ses ouvrières coloristes, cela près de dix ans avant la première guerre mondiale, époque réputée émancipatrice pour les femmes françaises dans le domaine du travail…
La seconde partie du documentaire porte sur la restauration du film le plus connu de Méliès, véritable travail d’archéo-cinématographie, partant de la découverte de la bobine en Espagne et aboutissant à sa projection cannoise dix ans plus tard.

Le documentaire propose des extraits des œuvres de Méliès, ses premiers films où le cinéaste se met en scène et innove techniquement, puis ses fantaisies filmées qui l’ont rendu mondialement célèbre. On regrette d’ailleurs que ces extraits soient trop courts et peu nombreux, souvent remplacés par des images d’archives non sourcées, très illustratives, ou bien les extraits d’un téléfilm de Tom Hanks relatant le tournage de Méliès à Montreuil dont l’usage semble un peu décalé.

Enfin le documentaire se clôt sur la diffusion du Voyage dans la lune. C’est une véritable pièce d’histoire du cinéma français et mondial que l’on (re)découvre alors. Il a d’ailleurs bénéficié d’une restauration dans une version colorisée inédite de très haut niveau. L’émerveillement est toujours là et le plaisir à voir la découverte du satellite de la terre et de leurs habitants, les sélénites, par d’intrépides savants, reste un enchantement. La musique électronique et actuelle du groupe Air, après un premier effet de surprise, accompagne parfaitement les images féériques de Méliès.
Qu’il s’agisse du documentaire de Serge Bromberg ou bien du film de Georges Méliès, ces deux supports proposent des pistes pédagogiques exploitables dans une perspective d’histoire des arts, en classe de quatrième ou bien de troisième. Le film de Méliès, datant de 1902, s’inscrit en effet dans une période charnière pouvant à la fois évoquer les dernières manifestations de l’âge industriel et de ses innovations au XIXème siècle ou bien les prémices des transformations technologiques et industrielles du XXème siècle, en s’appuyant sur l’exemple de l’industrie cinématographique, de sa naissance jusqu’à la révolution numérique.

Le voyage extraordinaire

Le voyage extraordinaire de Serge BROMBERG et Eric LANGE, suivi de Le voyage sur la lune de Georges MELIES, 1902 (version restaurée couleur d’origine)
Sortie en salle : 14 décembre 2011
Un travail en histoire des arts à réaliser à partir de ce film et un dossier pédagogique à télécharger sur le site de notre partenaire

AGENCE CINEMA EDUCATION
3 rue Louis Loucheur 75017 Paris
http://www.zerodeconduite.net

http://www.cinehig.clionautes.org/IMG/jpg_Le-Voyage-Extraordinaire.jpg

Sept ans après l’invention du cinématographe, Georges Méliès réalise Le voyage sur la lune. Le magicien, propriétaire du théâtre Robert-Houdin est un des spectateurs de la première représentation publique des frères Lumière au Grand Café le 28 décembre 1895. Séduit par cette nouvelle technique, il bricole une caméra, le kinetograph, et réalise ses premiers films dès 1896. L’année suivante, il construit à Montreuil le premier studio de cinéma : c’est là qu’il tourne ce film mythique, grand succès mondial, dont une copie couleur a été retrouvée au début des années 1980 à la cinémathèque de Barcelone.

Serge Bromberg, fondateur de Lobster Films (première collection privée d’images anciennes, Lobster Films est spécialisé dans la restauration de films anciens) et Eric Lange réalisent un documentaire de 65 minutes qui aborde plusieurs thèmes : les débuts du cinéma, l’apport de Méliès dans cet art naissant de l’ère industriel et l’histoire de la restauration du Voyage sur la Lune. Les deux premiers thèmes sont l’objet de la première partie du film, tandis que le suspense de la restauration du film de Méliès occupe la seconde partie. Ce documentaire précède la projection de la version restaurée du Voyage sur la Lune, un court-métrage de 15 minutes réalisé en 1902, accompagnée par une musique créée par le groupe Air.

La première partie est particulièrement réussie ; les réalisateurs échappent au documentaire classique : il y a certes la voix off et les images d’archives, mais un véritable dialogue créatif est institué entre la bande son et l’image. La scène d’ouverture est emblématique du parti-pris: les débuts du cinéma nous sont contés avec un travelling pris d’un tramway au début du siècle ; les gens regardent la caméra avec curiosité et le dialogue entre les sujets de tous ces extraits de films anciens et les spectateurs est alors institué. L’intérêt de cette première partie porte autant sur la biographie de Méliès et l’histoire du tournage du Voyage sur la lune que sur l’histoire des débuts du cinéma. Ce second thème reprend très largement les propos développés par Eric Lange en 2003 et 2004 dans deux documentaires excellents réalisés pour Lobster Film : A la recherche du son et A la recherche de la couleur. L’aventure Méliès est racontée avec brio : fils d’un fabricant de chaussures, Méliès réalise près de 500 films dont on connait moins de la moitié car le réalisateur a brûlé les bobines de ses films lorsqu’il est contraint de vendre ses studios de Montreuil. Véritable inventeur de la fiction cinématographique, sa carrière dans le cinéma s’achève avec la Première guerre mondiale : son travail artisanal ne résiste pas aux industriels de la production cinématographique en train de se constituer, et il se reconvertit en marchand de jouets dans les sous-sols de la gare Montparnasse.

La seconde partie du documentaire est consacrée à la restauration du film de Méliès. L’état de conservation du film retrouvé à la cinémathèque de Barcelone et échangé par Lobster Film contre une copie d’un film de Segundo de Chomon (célèbre plagiaire de Méliès ! A moins que l’on ne parle de remake…) ne laissait à peu près aucun espoir. La ténacité de passionnés du cinéma a eu raison de tous les obstacles techniques, et la restauration, racontée à la manière d’une enquête policière, est un récit palpitant. L’alliance de trois fondations pour le cinéma, Fondation Groupama Gan pour le Cinéma, Fondation Technicolor pour le Patrimoine du Cinéma et Lobster film a raison de tous les obstacles techniques, à commencer par l’état de dégradation du film. Les technologies les plus modernes ont permis de faire revivre un des plus vieux films de cet art né avec le XXe siècle.

Pour conclure, laissons la parole à l’enchanteur Méliès, maître de la technique de pointe de son époque : « J’étais un artiste dans l’âme (on me l’a assez reproché), fort adroit de mes mains, habile dans la plupart des métiers, inventif et comédien de nature. (…) je fus à la fois un travailleur « intellectuel » et manuel. Cela explique pourquoi j’ai aimé le cinéma passionnément. Cet art les renferme presque tous. Les conceptions fantaisistes, comiques ou fantastiques, voire même artistiques, qui se pressaient en foule dans mon imagination, trouvaient, grâce à lui, le moyen de se réaliser. Toute ma vie j’ai cherché, inventé et exécuté. »

Le dossier pédagogique à télécharger

http://www.zerodeconduite.net/levoyageextraordinaire

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